Les cartes mentales sont aujourd’hui très présentes dans les nouveaux manuels et de plus en plus de professeurs les utilisent en classe. L’article ci-dessous explique quelques uns de leurs avantages car il ne s’agit pas là simplement d’une passade ou d’une nouvelle mode.
Il est aujourd’hui particulièrement important de songer à personnaliser les apprentissages et la grande diversité des possibilités offertes par les cartes mentales permet de le faire. Au fur et à mesure que les élèves se familiariseront avec les modèles proposés ici et là, ils seront à même de fabriquer leurs propres cartes et c’est bien là le but. De la même façon, il convient de proposer assez souvent aux élèves de choisir le modèle qu’ils préfèrent ou qui correspond le mieux à leur façon d’apprendre. En effet, il est possible que certains élèves préfèrent la forme du tableau que celle de la carte mentale et il faudra en tenir compte. Comme tous les outils de ce type, l’idée n’est pas de l’imposer aux élèves comme LE seul moyen de progresser mais plutôt comme une possibilité.
Les cartes mentales rompent la linéarité d’une prise de notes traditionnelle. Leurs arborescences et la vision globale qu’elles offrent s’approchent sans doute mieux du fonctionnement de notre cerveau et de son fonctionnement cognitif. Ainsi, l’utilisation de cartes heuristiques (mind maps) en classe d’anglais peut s’avérer un outil de taille, susceptible de séduire les élèves jusque-là les plus réfractaires.
La technique du mind mapping n’est pas nouvelle. Le britannique Tony Buzan explique dans son livre Mind Map : Dessine-moi l’intelligence (1.) qu’il a développé l’« embryon du concept » au début des années 1960. Cependant, la linéarité semble encore et toujours prédominer dans l’enseignement secondaire, où les élèves ont, malgré l’apparition de celles-ci dans certains manuels, davantage l’habitude des présentations de type Powerpoint que des cartes heuristiques. Buzan recommande au lecteur de s’entraîner à dessiner de nombreuses cartes mentales avant de s’affranchir du modèle et d’introduire une touche plus personnelle et créative.
Ma rencontre avec les mind maps
À la fin des années 2000, une collègue du premier degré, chargée de mission en allemand, m’avait parlé du logiciel gratuit Freemind et m’avait montré tout le potentiel de ces arborescences illustrées et reliées les unes aux autres. Mais cette démonstration était restée sans lendemain : je n’avais pas alors intégré de cartes heuristiques dans mon enseignement de l’anglais.
Je me suis finalement appropriée cet outil et l’ai pleinement adopté, suite à une formation professionnelle « Gestion des conflits, renouer le contact, favoriser l'échange, la communication entre les élèves et entre élève/enseignant ». Lors de ce stage, il fut expliqué et démontré en quoi le mind mapping pouvait constituer un outil intéressant pour aider les adolescents en situation de décrochage. J’ai cette fois eu envie d’expérimenter cette technique, tant dans le domaine de la gestion de classe que dans celui de la compréhension de la langue. J’ai pu en effet constater que mes élèves de collège étaient souvent démunis face à un support audio ou de compréhension écrite et me suis demandée si l’utilisation de mind maps pouvait les aider à progresser.
Les mind maps nous permettent de faire des présentations synthétiques, non-linéaires, sous forme d’arborescences pouvant théoriquement être continuées à l’infini. Le lecteur-auditeur a ainsi une vision globale et peut suivre les liens que le locuteur fait entre les différentes idées qu’il développe dans son exposé.
Rappelons que le cerveau a des possibilités infinies et que celui-ci possède plusieurs dizaines de milliards de cellules nerveuses. Buzan s’est aperçu que nombre de génies dessinaient et raisonnaient sous forme de cartes mentales. Il est d’ailleurs intéressant de constater que ces cartes ressemblent aux ramifications neuronales : « En observant un neurone au microscope, on aperçoit ces tentacules, semblables aux ramifications d’un arbre, qui rayonnent à partir du centre de la cellule, appelé noyau. ». Selon Buzan, « d’innombrables 'cartes mentales' se forment et se développent dans notre cerveau » (2.)
Tony Buzan a développé cette technique parce qu’il cherchait à comprendre « en quoi la mémoire et la compréhension fonctionnent différemment ».
Mode d’emploi
Pour faire une carte mentale, on commence à partir d’une idée centrale et on construit diverses ramifications autour de celle-ci. Les branches peuvent avoir des « filles » et des « sœurs ». L’idée est d’attribuer un mot à chaque branche, de l’illustrer par une image simple et d’avoir recours à des couleurs différentes pour permettre une meilleure mémorisation du contenu. À l’école primaire, on utilise les mind maps pour l’apprentissage, la prise de notes, la prise de décision, etc.
Les mind maps en cours d’anglais
Du point de vue de l’enseignant d'anglais, l’utilisation des mind maps semble tout à fait intéressante dès la phase de préparation des cours, notamment pour mieux apprivoiser et mémoriser le contenu souvent riche des compréhensions orales et écrites proposées aux élèves. Lors de la mise en œuvre des compréhensions orales en classe, s’appuyer sur son propre travail « rayonnant » permet d’organiser différemment l’information perçue par les élèves. En effet, du point de vue de l’élève, la compréhension de l’oral n’est pas quelque chose de linéaire. Aider les élèves à créer des liens entre les différents éléments qu’ils sont capables de reconnaître permet de valoriser leurs efforts de compréhension et de travailler sur le sens global. L’aspect visuel des mind maps aide les élèves qui se découragent très vite à progressivement prendre conscience qu’ils sont capables de reconstruire du sens.
Lorsque j’ai commencé à faire des compréhensions orales avec une classe de 4e, dont plusieurs élèves étaient en situation de quasi-décrochage, je me suis arrachée les cheveux pour trouver un moyen de susciter l’envie d’essayer et de maintenir leur attention, tant leur résistance était grande. J’ai commencé à organiser certaines traces écrites succédant à des compréhensions sous forme de mind maps. Les élèves ont alors changé d’attitude, même les décrocheurs « dessinateurs » qui se sont laissés prendre à l’aspect visuel de la trace écrite. Pour la première fois, je ne redoutais plus ces phases compliquées, si bien que j’ai étendu la technique à la compréhension écrite.
Mise en garde
L’objectif, à terme, serait que chaque élève dessine sa propre carte mentale à partir de ce qu’il a compris et qu’il y ajoute ses propres dessins et couleurs. Il est bien entendu difficile de trouver le temps suffisant pour cela. Il ne faut pas non plus que cela devienne systématique ou que l’enseignant finisse par perdre de vue et renoncer au travail sur la compréhension plus fine des détails, les obstacles et les stratégies de compréhension.
Conclusions
L’application du mind mapping à la compréhension de l’oral et de l’écrit m’a aidée, ponctuellement, à remotiver une classe qui était réfractaire en début d’année. Ce fut pour moi, un moyen agréable d’aider des élèves à renouer avec le plaisir de comprendre et l’envie d’essayer.
Auteur(s) :
Claire Griffin est professeure dans l’Académie de Nantes après avoir été formatrice à l’IUFM de Paris. Elle est docteure en sciences cognitives du langage.
Copyright(s) :
1. (Buzan & Buzan, 1995, ed. 2012 : 8)
2. Source : Buzan, op.cit. pp.3-4, 8)
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