A teacher exchanging with a group of pupils in a language-teaching classroom.

Consolider les compétences orales des élèves

Posted by Speakeasy News > Wednesday 14 December 2022 > Pedagogy

Transformer l’essai de l’approche communicative et actionnelle.


Des élèves moins inhibés mais « pourvu qu’ils parlent… », est-ce suffisant ?

Il est indéniable que les élèves d’aujourd’hui sont, dans l’ensemble, moins inhibés et intimidés par le fait de s’exprimer en langue étrangère que ne l’étaient leurs homologues des années 1980 ou 1990. Et c’est à porter au crédit des professeurs qui, conscients de l’absolue nécessité de maîtriser une langue vivante étrangère dans le monde des échanges dans lequel nous vivons, mettent en œuvre dans les classes les recommandations des programmes de ces 20 dernières années.

Pourtant, les enseignants évoquent souvent leurs difficultés à établir une progression de l’acquisition des compétences orales depuis les premières années de l’apprentissage de l’anglais, en primaire, jusqu’à l’examen du baccalauréat. Ils ont parfois l’impression que les élèves piétinent au niveau A2-B1, ce qui ne permet pas d’atteindre un niveau stabilisé de maîtrise de la langue.

Cette série d’articles, loin de vouloir apporter une analyse globale de la question ou des solutions absolues, ambitionne de mettre en avant quelques points de vigilance dont beaucoup découlent de la pratique de classe frontale, encore très largement répandue.

Pour une pédagogie de l’oral

Les descripteurs du Cadre européen commun de référence en langues (volume complémentaire, actualisé en 2018 avec le détail d’une nouvelle compétence, celle de la médiation) montre, dès le niveau A2 que ce qui est visé en production orale générale est la production d’un discours, court au début puis de plus en plus étoffé et organisé, et non pas d’énoncés isolés mis bout à bout.

Qu’est-ce qui différencie un discours d’une série d’énoncés ?

Tout d’abord, l’intention et le point de vue. C’est-à-dire que l’élève/énonciateur peut/doit parfois se décentrer pour explorer différentes « voix ». L’approche actionnelle fourni un excellent cadre pour cela car l’élève n’y est pas toujours lui-même mais il endosse des rôles variés, toujours ancrés dans la réalité culturelle anglophone, selon la tâche à réaliser.

Puis, intervient la nécessité de planifier ce que l’on va dire : choisir dans son répertoire le lexique approprié, prévoir les points importants de son intervention, prendre en compte l’effet recherché dans l’auditoire, choisir les conventions propres à tel ou tel type de prise de parole (discussion informelle entre amis, échange avec adultes, discours, débat, etc.).

Ensuite, pour aller progressivement vers l’autonomie d’expression sans toujours avoir besoin d’avoir recours à la question « What’s the English for…? » qui, bien sûr, ne lui sera d’aucun secours en situation authentique en pays anglophone, l’élève doit maîtriser la capacité à compenser, par exemple, les difficultés lexicales : utiliser la gestuelle, une approximation, une périphrase, une description, etc.

Enfin, l’autonomie sera à portée de main, ou de bouche plutôt, lorsque l’élève prendra conscience des erreurs qu’il commet, non pas pour viser la correction grammaticale d’un natif mais pour éviter les confusions dans les échanges, revenir sur une difficulté en reformulant son propos ou même demander de l’aide pour s’auto-corriger.

Construire les compétences

Ces compétences, essentielles également dans la langue maternelle pour une maîtrise de l’oral optimale, ne sont pas innées et doivent se construire grâce à une réelle pédagogie de l’oral. La parole est le propre de l’être humain mais sa maîtrise opérationnelle ne va pas de soi et l’école doit jouer un rôle dans cet apprentissage pour dépasser les déterminismes sociaux. Evelyne Charmeux, auteure de nombreux ouvrages de didactique, notamment sur la lecture, explique dans son ouvrage Ap-prendre la parole. L’oral aussi, ça s’apprend (Ed. SEDRAP Éducation) que « [d]ans une démocratie, chacun a droit à la parole, ce droit n’est effectif que pour ceux qui savent la prendre et la tenir ». Ainsi, à l’école, l’entraînement à l’oral individuel permet de trouver sa voix/voie et celui à l’oral collectif favorise l’apprentissage de la démocratie et de la citoyenneté dans le microcosme de la société qu’est le cadre bienveillant et rassurant de la classe.

Dans la 2e partie de cet article, nous explorerons des alternatives à l’approche frontale et du « cours dialogué ».


Auteur(s) :

Ruth Alimi est IA-IPR dans l'académie de Paris, et conseillère pédagogique de Speakeasy News.